THEOULE-SUR-MER
Partie intégrante de l'agglomération cannoise (Pays de Lérins), Théoule-sur-Mer est la dernière commune des Alpes-Maritimes. Située sur la Baie de Cannes et les premiers contreforts du massif de l'Estérel, avec sa côte déchiquetée et ses plages parmi les mieux préservées de la Côte-d'Azur, Théoule offre aux pèlerins en route vers l'Espagne, l'une des dernières opportunités d'apercevoir la mer.
Étape traditionnelle du Chemin de Compostelle, les pèlerins éprouvés par la traversée montagneuse et souvent difficile du département, peuvent y reprendre des forces et profiter une dernière fois des plaisirs de la mer. Beaucoup de pèlerins posent ainsi leur sac à la Villa Saint-Camille, mi- village de vacances, mi-institution humanitaire. La résidence, située sur la Corniche d'Or bénéficie d'un panorama remarquable sur la Baie de Cannes et sur les îles de Lérins. Sa situation permet aux pèlerins d'accéder facilement aux criques et aux calanques de rochers rouges dont ils garderont longtemps le souvenir, beaucoup de ceux-ci ayant peu de chance de revoir ce type de paysages sauvages avant les côtes de Galice !
Pas exactement "ville pèlerine", Théoule est plutôt une ville de mémoire et de manifestations. On s'y rassemble pour se souvenir d'un passé douloureux, ou commémorer des évènements qui ont marqué l'histoire contemporaine. Théâtre principal du "Débarquement de Provence", Théoule fut aussi celui de son seul échec. Souvenir donc, à la fois héroïque et tragique, commémoré chaque année à la Pointe de l'Esquilon. Lieu de débarquement du premier commando allié mais miné la veille par l'armée allemande, la petite troupe fut entièrement décimée, et les survivants, tous faits prisonniers. Néanmoins, ceux débarqués plus à l'ouest réussirent leur percée et firent bientôt leur entrée dans la ville, si bien que Théoule deviendra pour toujours la première ville libérée des Alpes-Maritimes, mais la plus sévèrement détruite aussi.
Ville de mémoire aussi pour les milliers de "pèlerins" Pieds-Noirs qui viennent chaque année se recueillir devant Notre-Dame d'Afrique. Commandité par plusieurs organisations d'Anciens d'Algérie, le mémorial fut construit dans un vallon isolé de l'Estérel à partir de 1990 et inauguré plusieurs fois dans les années 2000 ; la dernière, "officielle", le 1er mai 2014. Haute d'environ 12 m, la statue est une réplique monumentale de la Vierge de Notre-Dame d'Afrique à Alger. Œuvre du sculpteur Fortuné Évangelisti, le monument élevé sur le Chemin-même de Saint-Jacques-de-Compostelle et de Rome, se voudrait aussi "sanctuaire" à l'usage de "pèlerins" nostalgiques en mal de reconnaissance, tant pour cette Algérie Française évanouie que pour leur dignité, jugée par beaucoup d'entre eux, "bafouée".
Dernière étape dans les Alpes-Maritimes, les pèlerins de Saint-Jacques désiraient aussi marquer leur passage avant de pénétrer dans le Var et poursuivre leur cheminement. Un oratoire dédié à Saint-Jacques élevé par leur association provençale au Pic Martin a été inauguré et béni par l'évêque de Nice en juin 2019. Une plaque commémorative, faisant en quelque sorte le pendant de celle posée à Menton, à l'autre extrémité du département, a également été scellée sur les murs de l'église Sainte-Germaine-de-Pibrac.
Ce tronçon Menton-Théoule de la voie Aurelia clôt ici la traversée des Alpes-Maritimes. Son tracé n'a jamais été parfaitement identifié ou figé. Moins fréquentée que la Via Domitia située plus au nord, elle était davantage exposée aux aléas politiques et subissait la concurrence maritime. Tout à la fois Chemin de montagne et de littoral, l'histoire de la Voie a déterminé la plupart des grands itinéraires actuels. Des pèlerins de toutes sortes et de toutes les origines la sillonnent dans les deux sens depuis la nuit des temps ; ceux de Compostelle et de Rome la parcourent depuis le Moyen-âge. Les pèlerins du XXe siècle la redécouvrent, chaque année plus nombreux.
Cf. : Patrimoine "non-jacquaire" - Théoule-sur-Mer