COLLOBRIERES
LA VERNE SANCTUAIRE
Notre-Dame-de-Clémence (chartreuse)
C'est vers 1170 que les évêques de Toulon (Pierre Isnard) et de Fréjus (Frédol d'Anduze) fondent un monastère qu'ils placent sous le vocable de la Vierge, et choisissent de confier à l'ordre des Chartreux, déjà présents à Montrieux. L'emplacement était celui d'un ancien prieuré abandonné portant déjà le nom de la Vierge.
La première église romane, construite, dit-on, sur un temple païen dédié à la déesse Laverna, protectrice des voleurs auxquels l'épaisse forêt des Maures offrait un asile sûr, est consacrée le 3 octobre 1174. Grâce aux nombreuses donations affluant de toute part, le domaine s'étend rapidement sur plus de trois milles hectares de forêts, pâturages, terres cultivables ou salines. Détruite par plusieurs incendies en 1214, 1271 et 1318 à l'exception de l'église, la chartreuse est chaque fois reconstruite ; elle est pillée en 1416 par les seigneurs de Bormes.
Ébranlée durant les guerres de religion au cours desquelles, semble-t-il, la voûte de l'église s'effondre, elle subsistera malgré tout jusqu'à la Révolution. Période noire de l'Histoire, l'Assemblée constituante décréta la confiscation des biens de La Verne ; les moines sont alors contraints de s'enfuir et de s'embarquer sur une barque de pêche au Lavandou. Rejoignant Nice, l'évêque met à leur disposition une aile de son évêché. La communauté se composait de 16 membres : onze pères et cinq convers ; le dernier prieur, Dom Raphaël part se réfugier à Bologne. La nature investit alors les lieux ; six siècles d'Histoire de la Verne s'achevaient.
Un décret du 18 janvier 1921 constituera l'acte d'une renaissance de la chartreuse. Le classement au titre des Monuments Historiques précise la nature des "Vestiges dans la forêt". Les Eaux et Forêts deviennent affectataires au nom des domaines et y installent un gardien.
Mais le véritable sauvetage de la chartreuse n'interviendra qu'en 1968 avec la création d'une association baptisée "les amis de la Verne", bien décidée à rénover le site. Malgré de faibles moyens, mais grâce à beaucoup d'énergie et d'envie, les travaux importants engagés font sortir progressivement la chartreuse de l'oubli.
En 1982, la Verne retrouve enfin une nouvelle vocation religieuse avec l'accueil de premiers moines. Mais la véritable relance viendra en 1986 avec l'arrivée des moniales de Bethléem, de l'Assomption de la Vierge et de saint Bruno. Des travaux beaucoup plus importants de rénovation de l'ensemble sont engagés, notamment ceux de l'église romane et du grand cloître.
Le domaine couvre une superficie d'un hectare et demi et conserve l'aspect d'une forteresse avec une tour percée d'une porte, surmontée d'un mâchicoulis. De la période romane, très peu d'éléments ont subsisté hors un mur de l'église et une partie de l'abside. L'ensemble des bâtiments, avant restauration, ne remontent qu'au XVIIe siècle. L'ancien maître-autel est transféré à la chartreuse de Montrieux et la cloche du XVIIe siècle, dans le grand vestibule d'entrée de la Mairie de Collobières. Quant à la tintenelle (cloche d'appel), elle est classée Monument Historique depuis le 26 juin 1982.
Aujourd'hui, la chartreuse semble sauvée et réhabilitée. L'architecture des bâtiments permettent aux moines et aux moniales d'y vivre selon la sagesse évangélique de saint Bruno, à la fois solitaire, liturgique et fraternelle, de répondre à l'appel de Dieu qui les conduit au désert. Trois demeures, en quelque sorte, constituant un unique monastère.