LA CELLE
LA CELLE
La commune est surtout connue pour son abbaye romane du XIe siècle fondée par les moines bénédictins de Saint-Victor de Marseille. Cette donation de terres brignolaises en 1011, pour la construction d'un premier monastère, comprenait les églises Sainte-Perpétue et Sainte-Marie ; elle marquait l'indépendance de La Celle vis-à-vis de Brignoles. Une bulle du pape Alexandre III datée de 1160 confirme l'existence d'un monastère de femmes à La Celle.
Abbaye de La Celle (Sainte-Perpétue)
Le monastère du XIe siècle, totalement reconstruit aux XIIe et XIIIe siècles, comprenait divers bâtiments dont plusieurs sont parvenus jusqu'à nous. Les moines avaient reçu en donation des terres sur lesquelles se trouvaient déjà deux églises qu'ils érigèrent en un double prieuré (ensemble improprement appelé abbaye de nos jours). Les hommes, d'un côté, desservaient l'église Sainte-Perpétue et assuraient les offices pour les populations locales ; ils avaient leur propre cloître. Les moniales, de l'autre, utilisaient l'église Sainte-Marie par laquelle elles accédaient à leur cloître. Trois de ses galeries ont été sauvegardées. La salle capitulaire du XIIIe siècle est remarquable : deux piliers trapus à chapiteaux ornés de dessins géométriques, supportent une voute à arêtes ogivales à croisillon typiquement romane. Les deux établissements avaient à leur tête un prieur et une prieure désignés par les moines de SaintVictor. L'un d'eux, Marcel Cervin, sera élu pape en 1555 sous le nom de Marcel II (qui mourra vingt jours après son élection). Au XIIIe siècle, le monastère s'affirma comme une importante fondation féminine avec plus d'une centaine de Bénédictines, appartenant toutes à la haute noblesse provençale. Ainsi, la mère de Raymond Béranger V, Garsende de Sabran comtesse de Provence et de Forcalquier qui prit le voile après son veuvage (1225), en fut la plus illustre des pensionnaires. Aux siècles suivants, la situation se dégrade progressivement ; les sœurs souhaitent se séparer de la tutelle des moines de Saint-Victor avec lesquels elles sont en conflit permanent. Au XVIIe siècle, le cardinal Mazarin qui était abbé de Saint-Victor, finira par transférer les moniales à Aix-en-Provence (1660) ; un prieur restera néanmoins sur le domaine jusqu'à la Révolution. Vendue et morcelée en 1792, l'abbaye est transformée en exploitation agricole. Malgré son classement Monument Historique en 1886, les bâtiments conventuels tombent progressivement en ruine. Un hôtel restaurant de luxe s'installe en 1930 dans des bâtiments dont l'affectation d'origine reste imprécise ; le général de Gaulle y séjournera trois fois entre 1955 et 1960. Le domaine devient patrimoine public à la mort de sa propriétaire en 1971. Des soirées musicales sont organisées dans l'abbaye pendant que d'importants travaux de restauration sont entrepris.
Restauration de l'abbaye
Fermée depuis 1992, l'abbaye de la Celle devrait bientôt connaitre une renaissance. Cette restauration "à l'identique" a connu plusieurs phases de travaux : la galerie nord du cloître (1992-98) puis la partie médiévale de l'aile est (1998-99) comprenant le confortement du dortoir des moniales et la restitution des voûtes en pierre, ainsi que le réaménagement de la salle capitulaire, du scriptorium et du chauffoir. Suivent en 2000, la restauration des espaces intérieurs et extérieurs de l'abbaye ; en 2003-04, la réfection des terrasses des autres galeries du cloître et l'achèvement des voûtes ; en 2010-16, restauration de l'aile sud et réfection des accès et de l'ancienne cuisine ; et enfin de 2010 à 2020, l'ultime phase de travaux qui suivra la dernière campagne de fouilles archéologiques, pour terminer la restauration du cloître et de son jardin.
Église Notre-Dame de l'Assomption
L'ancienne Sainte-Marie de l'Abbaye, vendue comme bien national en 1797, est rachetée par le père curé Brun (1833) afin de remplacer l'ancienne église Saint-Jean-l'Évangéliste en état de complet délabrement. Il fait transporter tout ce qui se trouvait dans l'église Saint-Jean et fait alors de SainteMarie la nouvelle église paroissiale. Cette église du XIIe siècle comprend une seule nef divisée en trois travées formées par des arcades prises dans le mur. La voute en berceau, renforcée par des arcs doubleaux, repose sur des pilastres et un cordon qui court tout autour de la nef. L'église est éclairée par deux fenêtres cintrées et par une autre en ogive située au-dessus du sanctuaire. La façade est surmontée d'un campanile de construction moderne, au-dessus duquel une cage de fer ouvragée porte la cloche de l'horloge. Le Christ en bois sculpté d'un réalisme effrayant suspendu à un pilier semble remonter, d'après Viollet-le-Duc, au XIe siècle. L'église et les bâtiments de l'ancien monastère sont classés Monument Historique depuis 1889, de même que le tableau de l'autel (XVe siècle) et la cuve baptismale.
Chapelle de la Gayolle (Notre-Dame de la Gayolle)
Ancienne église Sainte-Perpétue de l'abbaye, la chapelle de la Gayolle est assurément l'une des plus anciennes de Provence. Le nom de "Gayolle" viendrait de Gaïsola, c'est-à-dire "petite église". Les vestiges d'époque romaine et les nombreux sarcophages de pierre trouvés dans la chapelle témoignent aussi de son ancienneté. L'un d'eux sert aujourd'hui de bassin à la fontaine de la ferme voisine ; un autre, particulièrement précieux (Cf. Syagria ci-dessous) conservé au Musée de Brignoles, serait de la fin du IIe siècle (son fond est resté sur place). La chapelle montre clairement les deux époques distinctes de sa construction. Un premier édifice comprenant une nef et un chevet plat pourrait être du Ve siècle. Une ou deux chapelles latérales ont été ajouté rapidement à la nef pour former le transept. Des inhumations à sarcophage et sous tuile y sont installées jusqu'à la fin du VIe siècle ; un second édifice prend appui sur le chevet de l'ancien. Sa nef unique, voutée en berceau légèrement brisé, se termine par un transept bas et une vaste abside en hémicycle, voutée dès l'origine. C'est de cette partie qu'ont été extraits en 1628 les deux sarcophages.
Sarcophage de Syagria (de la Gayolle)
Ce sarcophage exceptionnel, découvert dans les fondations de la chapelle est exposé depuis 1962 au Musée du Pays Brignolais. Daté du IIe ou IIIe siècle, il porte l'inscription suivante : "Hic requiescet in pace bone memoriae Syagria qui obiet XII kal februarias indic undecema" (Ici repose dans la paix Syagria de bonne mémoire qui mourut le douzième jour avant les kalandes de février l'année onzième). Constitué de marbre blanc, le décor évoque un au-delà heureux, qui en fait l'un des plus anciens sarcophages chrétiens de toute la Gaule. On y voit la représentation du bon pasteur avec trois brebis, un pêcheur à la ligne et une ancre. Également, un orante les mains ouvertes et une femme assise devant laquelle se trouve un enfant, un autre berger portant une brebis et un philosophe assis… autant de symboles typiquement chrétiens rassemblés sur un seul support. D'abord cédé (1860) au petit séminaire de Brignoles il est récupéré en 1908, après la séparation de l'Église et de l'État, son affectation n'étant plus conforme aux exigences de la donation. Le propriétaire du Domaine de la Gayolle en fera don au Musée de Brignoles.